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Aide médicale à mourir: Les malades « inaptes » au cœur d’une longue réflexion

DENIS LESSARD – La Presse – 25 mars 2017

QUÉBEC — Dans une démarche qui paraît faire consensus à l’Assemblée nationale, le gouvernement va demander à un groupe d’experts de se pencher sur les critères qui permettraient d’ouvrir l’aide médicale à mourir aux malades « inaptes », par exemple ceux atteints d’alzheimer, qui ne sont pas en mesure de prendre des décisions les concernant.

Pour le premier ministre Couillard, le Québec est déjà dans le peloton de tête en termes d’ouverture avec sa loi sur l’aide médicale a mourir. Pas question de brûler les étapes. « S’il y a quelqu’un qui est persuadé de l’extrême délicatesse de la question, c’est moi ! », lance-t-il.

Le ministre de la Santé Gaétan Barrette a annoncé hier une démarche en trois points afin de rouvrir le débat sur les soins de fin de vie et l’aide médicale à mourir. Ces démarches prendront au moins un an, prédit-il, et devraient, le cas échéant, se conclure par un vote libre – sans ligne de parti – à l’Assemblée nationale. La prudence s’impose. Québec ne pourra faire l’économie d’une longue réflexion, insiste-t-il.

Député de la Coalition avenir Québec, François Paradis est d’accord avec une démarche « qui prendra le temps que cela prendra ». Il souhaite qu’il y ait par la suite une démarche publique permettant à l’ensemble de la population de se prononcer.

Avant la loi actuelle, une commission parlementaire avait reçu 260 mémoires. « Je demande aux collègues de comprendre que cela pourrait être long, plus d’un an, mais qu’on ne perde pas de vue que la réflexion devra se poursuivre jusqu’à sa conclusion », a souligné le député caquiste de Lévis.

« Je me réjouis donc que le gouvernement embarque dans le débat, qu’il souhaite que ce débat se fasse », a souligné de son côté la péquiste Véronique Hivon. Un bémol, toutefois : « Je suis déçue que, pour la première fois dans ce dossier, on s’éloigne de l’esprit de collaboration non partisan qui a toujours été là pour les travaux sur les soins de fin de vie et à l’aide médicale à mourir. Je suis surprise que les oppositions n’aient pas été consultées. » Pour elle, il est clair que si on ouvre l’aide médicale à mourir aux personnes inaptes – les gens atteints d’alzheimer, par exemple –, seules celles qui auront donné une autorisation préalable pourront y recourir.

Des enjeux complexes

Le ministre Barrette a indiqué que Québec allait charger « un groupe d’experts [d’]amorcer la réflexion sur les critères de l’aide médicale à mourir, particulièrement pour les inaptes, et les demandes anticipées ». Pour le moment, la commission mise en place par Québec se prononce uniquement sur les demandes émanant de personnes jugées aptes à décider de leur sort. Les experts vont se pencher sur les cas où le patient n’est pas suffisamment lucide pour choisir d’accélérer son départ. Il n’est pas simple de trancher ces situations, rappelle le ministre Barrette. Se pencher sur les inaptes, « c’est un univers totalement différent. L’alzheimer, c’est progressif. Qui va me dire où trancher ? Si des gens disent qu’ils ne veulent pas vivre alités 24 heures par jour, on peut le comprendre », de souligner le ministre.

Du même souffle, la ministre de la Justice, Stéphanie Vallée, va se tourner vers les tribunaux pour demander une clarification de la notion de « mort raisonnablement prévisible » prévue par la loi C-14. Beaucoup d’ordres professionnels, des avocats aux médecins, en passant par les infirmières, ont demandé au gouvernement une clarification de cette notion « inapplicable, inopérable parce que trop floue ».

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