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Aucun pharmacien dans le tiers des CHSLD

 Ariane Lacoursière – La Presse –  08 février 2019 à 05h00

Le tiers des CHSLD publics de la province n’ont aucun pharmacien sur place pour évaluer correctement la médication des résidants. Une situation qui inquiète l’Association des pharmaciens des établissements de santé du Québec (APES), qui rappelle que chaque résidant de CHSLD consomme en moyenne 14 médicaments par jour.

« Il y a tellement d’incidents liés aux médicaments. Avoir une présence de pharmacien qui peut réviser l’ensemble de la médication est essentiel », affirme la directrice générale de l’APES, Linda Vaillant.

En analysant les informations de sa plus récente enquête annuelle sur les effectifs, l’APES a évalué que sur les quelque 370 installations ayant une mission publique de CHSLD au Québec, 120 n’ont pas de pharmacien « affecté aux soins pharmaceutiques ». Certes, un pharmacien valide à distance les ordonnances faites dans ces installations. Il vérifie notamment que chaque médicament est bien destiné au bon patient et que la dose est adéquate. Mais il ne peut analyser le dossier médical complet des patients et ajuster leur médication.

Au ministère de la Santé, on affirme ne pas pouvoir confirmer les chiffres fournis par l’APES, puisque les pharmaciens sont employés des CISSS et des CIUSSS et qu’il « est de la responsabilité des établissements de répartir leur effectif disponible de façon optimale ».

Un projet menacé

Pour Mme Vaillant, la pénurie de pharmaciens en CHSLD est d’autant plus inquiétante que, la semaine dernière, Québec annonçait qu’un projet pilote visant à réduire la consommation d’antipsychotiques dans les CHSLD serait étendu à 134 établissements.

« Le projet ne pourra pas continuer de se développer si on n’a pas plus de pharmaciens. »

– Linda Vaillant, directrice générale de l’APES

La phase 1 du projet appelé « Optimisation des pratiques, des usages, des soins et des services – Antipsychotiques (OPUS-AP) » s’est déroulée dans 24 CHSLD du Québec. Le Dr Jacques Ricard, coordonnateur provincial de la démarche OPUS-AP, précise que la « déprescription » a été un succès chez 86 % des participants.

Selon le Dr Ricard, les installations qui prendront part à la phase 2 du projet OPUS-AP ont été choisies de façon à ce que la pénurie de pharmaciens ne pose pas problème. « On a demandé des unités où il y aurait les ressources pour le faire […]. Il est clair que le pharmacien est au coeur de cette démarche », explique-t-il, tout en reconnaissant que lors de la conception du projet OPUS-AP, la pénurie de pharmaciens dans les CHSLD avait été ciblée « comme un enjeu majeur ».

Trop peu de diplômés

Alors qu’un diplômé de premier cycle en pharmacie peut travailler au privé, pour devenir pharmacien d’établissement, il faut obtenir une maîtrise de 16 mois. Chaque année, environ 70 pharmaciens d’établissement obtiennent leur diplôme. « On en aurait besoin d’une centaine », note Mme Vaillant.

Au ministère de la Santé et des Services sociaux (MSSS), on souligne que la profession de pharmacien d’établissement « est un titre d’emploi en veille ». Le MSSS projette de recruter 656 pharmaciens d’établissement sur cinq ans. Pour attirer les candidats, le MSSS donnera par exemple cette année 85 bourses de 40 000 $ chacune.

Du côté de l’Ordre des pharmaciens du Québec, on confirme, sans pouvoir la chiffrer, que la pénurie de pharmaciens est réelle en CHSLD. Depuis des années, l’Ordre demande à Québec de rehausser le programme de formation des adjointes techniques en pharmacie pour leur permettre d’exécuter plus de tâches techniques et d’ainsi libérer du temps clinique pour tous les pharmaciens, dont ceux qui travaillent en établissement et en CHSLD.

Pour Mme Vaillant, ce changement ne permettrait pas de pourvoir les postes vacants actuellement, mais permettrait assurément de dégager des heures pour les pharmaciens. « Ça fait partie de la solution », dit-elle.

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