Jean-Louis Denis, chercheur principal, Université de Montréal
Au Québec, la récente actualité dans les médias francophones met de l’avant un enjeu incontournable : la rémunération médicale devrait être à la hauteur des services rendus à la population québécoise.
En 2014, la rémunération des médecins représentait 21 % des dépenses de santé au Québec (ICIS, 2016). Entre 2010 et 2015, au Québec, les revenus bruts moyens des médecins ont crû de 22 % contre 8 % en moyenne au Canada (ICIS, 2015). Au regard de la croissance des dépenses médicales et de l’évolution de facteurs qui affectent les systèmes de santé (démographiques, épidémiologiques, professionnels, etc.), la plupart des pays industrialisés revoient leur manière de payer les médecins. L’analyse de connaissances issues des littératures scientifiques et grises traitant de la rémunération médicale a permis d’identifier une tendance des changements allant vers des combinaisons de modèles de rémunération de plus en plus diversifiées, qualifiées de modèles hétérogènes.
Il serait souhaitable de mieux comprendre et simplifier les modèles de rémunération en favorisant la transparence, la cohérence et la reddition de comptes.
Le Québec se situe dans cette lignée : alors que la rémunération à l’acte demeure dominante, d’autres formes de rémunération (salaire, honoraires forfaitaires, mesures incitatives, rémunération mixte, etc.) complètent les revenus des médecins. Ces modèles hétérogènes visent une meilleure intégration du médecin à l’organisation et une amélioration de la qualité et de l’efficience des soins.
Compte tenu de la mise en place récente de ces modèles, les résultats sur leurs effets ne permettent pas de dégager une ligne directrice claire à des fins d’application au Québec. Dans cette optique, les actions à privilégier devraient être de deux ordres. Dans le contexte actuel de rémunération, il serait souhaitable de mieux comprendre et simplifier les modèles de rémunération en place en favorisant la transparence, la cohérence (ex. : méthode de calcul de la valeur de l’acte et révision périodique) et la reddition de comptes (ex. : qualité et sécurité des soins, maîtrise des coûts).
Dans une perspective d’innovation de la politique de rémunération médicale, une expérimentation et une évaluation systématique de modèles innovants de rémunération serait de mise afin de mieux servir des clientèles jugées prioritaires ou de mieux répondre aux besoins de prise en charge de certaines pathologies. À cette fin, il serait important d’envisager une analyse intégrée des leviers de performance pouvant agir en complémentarité de la rémunération médicale (gouvernance clinique, professionnalisme). Ceci favoriserait une meilleure cohérence entre les finalités du système de santé et les préférences des parties prenantes concernés.
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