Louise Larose Adjointe juridique, Saint-Hippolyte
La Presse – 24 avril 2017
Depuis le 15 janvier 2016, je n’ai plus de médecin de famille. Ma médecin est décédée et elle était ma médecin de famille depuis 30 ans.
Je me suis inscrite sur une liste d’attente et on m’a répondu que je devais attendre environ 700 jours pour avoir un médecin. Environ 250 jours se sont écoulés et je n’ai pas de nouvelles pour un nouveau médecin.
Aujourd’hui, j’ai 57 ans et je suis une femme qui n’a ni maladie ni problème chronique. Je prends que des médicaments préventifs comme le Pantoloc, des hormones et des médicaments pour l’asthme que je ne prends qu’à l’effort. Ces médicaments viennent à la fin de leur période de renouvellement et je suis à la recherche d’un médecin pour le faire. Le médecin de famille de mon mari et de mes enfants, et ce depuis 30 ans, qui est à la même clinique que ma médecin et qui me connaît bien aussi, refuse de me prendre ou de renouveler mes médicaments.
J’ai essayé dans une clinique pour rencontrer un médecin sans rendez-vous et on a refusé de renouveler mes médicaments, sous prétexte que c’était contraire à leur politique.
Ils m’ont conseillé d’aller au CLSC de ma région. Saviez-vous que pour aller dans un CLSC, il faut se lever à 5 h du matin pour aller attendre devant la porte jusqu’à l’ouverture de la clinique, sinon vous arrivez trop tard et il n’y a plus de place pour la journée ? Je passe devant le CLSC tous les matins à 6 h 45 et je vois déjà des gens assis sur leur chaise de camping à attendre l’ouverture pour être sûrs de pouvoir voir un médecin la journée même.
Je dois passer une colonoscopie tous les cinq ans et une gastroscopie tous les deux ans. J’attendais depuis janvier 2017 qu’on m’appelle, et lorsque j’ai appelé le cabinet de mon gastroentérologue, du Centre hospitalier universitaire McGill, sa secrétaire a refusé de me donner un rendez-vous sans le formulaire qui doit être rempli par mon médecin (selon eux, c’est une nouvelle loi qui l’oblige même si mon gastroentérologue m’a lui-même indiqué, à mon dernier examen, de rappeler en janvier 2017 pour mon prochain examen, quelle ironie). Même ce document, je ne trouve pas de médecin pour le remplir.
J’ai donc dû faire appel à une clinique privée qui, elle, moyennant une prime annuelle pour faire partie de sa clientèle et un montant à l’heure lors de la consultation, va me faire passer tous les tests annuels, prise de sang, etc., renouveler mes prescriptions et remplir mon formulaire pour ma colonoscopie, et ce, avec le sourire. (Encore là, quelle ironie.)
Nous sommes dans une province où nous payons une taxe sur les médicaments, une prime d’assurance médicaments lorsqu’on n’a pas d’assurance avec notre employeur et une prime à la RAMQ sur notre paie chaque semaine, et, avec tout ça, il m’est impossible d’avoir accès à un médecin pour le renouvellement de mes prescriptions et le suivi des examens pour les dépistages de cancer.
Et je confirme que je suis une femme en parfaite santé. Je n’ose imaginer le calvaire des personnes malades.
Vous m’excuserez, Dr Barrette, mais même avec vos belles paroles que tout va bien dans notre beau système de santé, je ne crois plus au miracle et je pense sincèrement que nous avons un sérieux problème dans notre service de santé.
Il faudrait peut-être réfléchir en vrai médecin et bon père de famille, et non en administrateur ou ministre qui ne pense qu’aux actionnaires qui désirent faire plus d’argent pour avoir de plus belles primes, et voir à ce que les patients soient la vraie priorité du gouvernement et à engager plus de médecins et de superinfirmières ou à changer votre stupide loi de « médecin de famille » qui ne fonctionne pas.
Vous bâtissez de nouveaux hôpitaux et vous devez fermer des lits, faute de personnel et d’argent. Il y a là un non-sens que je n’arrive pas à comprendre.
Sur ce, je vous souhaite une excellente santé.