Santé Les compressions minent les services prioritaires, selon la CSN

Santé 

Les compressions minent les services prioritaires, selon la CSN

16 février 2017 |Amélie Daoust-Boisvert | Santé

 

La CSN calcule que, dans la grande région de Montréal, les coupes dans les services directs atteignent 227 millions pour l’année en cours, dont 14 millions dans le soutien à domicile.

Les compressions dans le réseau de la santé et des services sociaux ont été si massives depuis 2010 que même des secteurs établis comme prioritaires par Québec souffrent de coupes nettes, conclut la Confédération des syndicats nationaux (CSN) dans une étude publiée mercredi.

La CSN estime à entre 1 et 3,5 milliards le manque à gagner dans le réseau depuis 2013-2014.

Le financement par habitant a connu un recul de 9 % entre 2010 et 2014, calcule le syndicat, reprenant des données de l’Institut canadien d’information sur la santé. En dollars constants, c’est une chute de 1357 $ à 1238 $.

La CSN, en épluchant les budgets des établissements du réseau, constate que ces derniers sont forcés de rogner dans les budgets de missions pourtant déterminées comme prioritaires par le gouvernement.

Par exemple, dans la grande région de Montréal (incluant le « 450 »), la CSN calcule que les coupes dans les services directs atteignent 227 millions pour l’année en cours, dont 20 millions dans le soutien aux personnes en perte d’autonomie et 14 millions dans le soutien à domicile.

« On veut alerter la population, la situation est insoutenable », a lancé le président de la CSN, Jacques Létourneau, en conférence de presse.

Ayant rencontré le ministre des Finances Carlos Leitão dans le cadre de ses consultations prébudgétaires, M. Létourneau croit « qu’il faut faire d’autres choix que de rembourser la dette et diminuer les impôts des plus nantis ».

Au cabinet du ministre de la Santé et des Services sociaux Gaétan Barrette, on maintient qu’« il n’y a pas de coupes »,mais un « contrôle des dépenses ». « Nous avons ainsi dégagé des marges de manoeuvre pour faire des investissements supplémentaires », insiste l’attachée de presse du ministre, Julie White, rappelant que les syndicats de la santé sont actuellement plongés dans une période de maraudage.

Les analyses « convergent »

Le professeur honoraire au Département d’administration de la santé de l’Université de Montréal Paul Lamarche soutient que « lorsque les multiples sources convergent, et pas seulement les syndicats », on ne peut que se rendre à l’évidence : le manque à gagner est de 0,6 à 1 milliard par an dans le réseau de la santé et des services sociaux.

Dans ses propres recherches, il a été à même de constater que le Québec est la province qui s’est le plus désengagée du financement de la santé. « De 75 % des dépenses de santé assumées par le gouvernement du Québec en 1975, ce n’était plus que de 64,5 % en 2015, a-t-il calculé. Le privé prend de plus en plus de place. »

La position de Québec est plus « idéologique que budgétaire », selon lui. « Et ces dernières années, les coupes ont été faites dans les services pour lesquels on dépensait déjà le moins, comme les services hospitaliers, la santé publique, par exemple. »

Pour l’économiste et chercheur au CIRANO Jean-Pierre Aubry, la CSN « a raison de poser ces questions-là ». Selon lui, le syndicat tient trop peu compte des gains de productivité possibles du réseau, mais il ne réfute pas ses conclusions. « Si on analyse l’écart entre la croissance de la demande en santé et la croissance des budgets, celui-ci se creuse d’année en année. » Il déplore la « piètre reddition de compte du gouvernement », sans laquelle il est difficile de voir clair dans ces chiffres sans partisanerie.

Ce que d’autres ont dit avant eux

La CSN n’est pas la première à sonner l’alarme au sujet du financement du réseau de la santé. Déjà en 2014, sous un gouvernement du Parti québécois, la défunte association des gestionnaires du réseau de la santé, l’AQESSS, affirmait que la croissance des budgets mettait à mal les services à la population.

Plus récemment, « l’austérité a fait mal », concluait Raymonde Saint-Germain en septembre, au moment de remettre son dernier rapport à titre de protectrice du citoyen.

L’Institut de recherche et d’informations socio-économiques (IRIS) soulignait aussi dans son plus récent rapport sur le système de santé que les dépenses en santé par personne, au Québec, sont parmi les plus basses au Canada.

Visualiser aussi

Le milieu des affaires inquiet face à la révision du crédit pour les employés âgés

La Presse canadienne – 21 novembre 2024 L’exclusion des travailleurs québécois âgés de 60 à 64 ans …