Transferts fédéraux Au nom de la santé

Transferts fédéraux

Au nom de la santé

Il ne faut pas confondre échec et séance d’échauffement. Que les ministres de la Santé et des Finances réunis à Ottawa ne soient pas parvenus à s’entendre sur les transferts fédéraux en santé lundi ne devrait surprendre personne. L’heure n’était pas au compromis, mais aux démonstrations de force pour la galerie.

Pour une fois, c’est le ministre québécois de la Santé Gaétan Barrette qui a analysé la situation le plus froidement. « On comprendra tous qu’avec un enjeu aussi complexe que celui du système de santé, ça ne peut pas se résoudre en deux heures […] Ce n’est que le début de la négociation », a-t-il fait valoir en point de point de presse.

Gardez vos vestons, messieurs et mesdames les ministres, il est beaucoup trop tôt pour déchirer sa chemise.

Il s’en trouvera évidemment pour prétendre qu’il est minuit moins une, puisque l’accord actuel prend fin en avril et qu’il y a des budgets à préparer avant. Ne nous contons pas d’histoires : personne n’est rentré à pied pour cause de limousine transformée en citrouille. On n’est pas au bal de Cendrillon, mais dans un club privé qui reste ouvert bien après l’heure de fermeture des bars. À minuit moins une, la soirée est encore jeune.

Pour l’instant, on est encore dans l’esbroufe. Chacun se prétend le meilleur défenseur des intérêts de la population – les provinces en protégeant le volume de services, le fédéral en augmentant les soins à domicile et en santé mentale.

Les intentions sont sincères, mais elles taisent l’essentiel.

Le transfert canadien en matière de santé (TCS) est, de loin, le plus important transfert fédéral. Il représente environ la moitié des sommes versées aux provinces et territoires. Au-delà des patients, c’est sa marge de manœuvre que chaque gouvernement cherche à défendre. Les changements apportés au calcul du TCS par l’administration Harper ont contribué à redresser les finances fédérales tout en refilant un fardeau financier aux provinces et territoires, avait d’ailleurs souligné le Directeur parlementaire du budget il y a deux ans.

Les ministres de la Santé ont donc raison de dire que des transferts insuffisants affecteraient les volumes de soins. La santé rafle déjà la part du lion des budgets provinciaux, on ne va pas déshabiller l’éducation, la justice ou d’autres services pour lui en remettre une couche. Mais la ministre fédérale de la Santé, Jane Philpott, a aussi raison de dire que les provinces n’investissent pas assez en soins à domicile et en santé mentale, et que le précédent accord n’a pas amené beaucoup de transformations.

Il faut toutefois se rappeler que le discours fédéral d’alors prêchait surtout la réduction des délais, créant des attentes dans la population et, par ricochet, une pression sur les provinces. Résultat, on a surtout mis l’accent sur les volumes de certaines activités, dont les fameuses opérations du genou, de la hanche et de la cataracte.

Et n’en déplaise au gouvernement Trudeau, c’est ainsi que le fédéral doit exercer son leadership sur le TCS.

Son rôle en est un de communication et d’influence, pas de parachutage de colis d’aide humanitaire sur le territoire des provinces.

Reste à s’entendre sur les chiffres. On comprend Ottawa de ne pas vouloir s’engager à ramasser le quart d’une facture dont il n’a pas le contrôle. Mais un scénario qui lui permettrait, à terme, de réduire sa participation, est tout aussi inacceptable. Entre la croissance actuelle de 6 % par an et les 4,4 % que le ministre fédéral des Finances a essayé de faire passer pour sa meilleure offre, il va falloir trouver une voie de passage.

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