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Éditorial – Rémunération des médecins spécialistes Plus qu’une question de confiance

Ariane Krol – la Presse – 17 mars 2018

Que les médecins spécialistes se rassurent : leur désir de donner les meilleurs soins possible à leurs patients et leurs compétences pour le faire ne sont nullement remis en cause. Les Québécois, cependant, ont raison de s’interroger sur les ententes que leurs gouvernements successifs ont signées avec les syndicats médicaux.

Le débat entourant la rémunération des médecins n’est pas nouveau, mais la dernière entente négociée avec la Fédération des médecins spécialistes du Québec (FMSQ) a interpellé le public comme jamais.

Plusieurs médecins se sont sentis personnellement visés, certains ont même été pris à partie par des patients. Il était donc compréhensible que la FMSQ, dans sa première sortie publique depuis la conclusion de l’entente, fasse écho à l’inconfort de ses membres, et réitère l’importance du lien de confiance entre le malade et le spécialiste qui lui prescrit un traitement ou s’apprête à l’opérer. Message entendu, d’autant que le professionnalisme des médecins n’a jamais été mis en doute dans cette histoire.

Il n’en reste pas moins que la rémunération de l’ensemble des médecins québécois, spécialistes et omnipraticiens, a pris une part grandissante des budgets de santé et de services sociaux au fil des ans.

Environ 20 % des dépenses de programme du Ministère servent désormais à payer les médecins, soit un dollar sur cinq. L’importance de ce poste budgétaire en fait un enjeu incontournable.

Nos médecins sont-ils payés correctement par rapport à leurs confrères des autres provinces ? Cet élément fondamental, sur lequel les parties auraient dû aller chercher un avis indépendant il y a déjà sept ans, sera enfin documenté de façon sérieuse par l’Institut canadien d’information sur la santé (ICIS). Le mandat présenté dans l’entente de la FMSQ, qui tient compte de multiples facteurs, incluant le coût de la vie, paraît rigoureux et crédible.

Par contre, la clause prévoyant que ce rapport (comme celui qui sera commandé au sujet des omnipraticiens) soit gardé confidentiel est inacceptable. Les deux ententes reconnaissent, avec raison, que les documents liés aux mandats confiés à l’ICIS appartiennent autant au Ministère qu’aux fédérations. Il est évident que ces rapports seront d’intérêt public, et devront être partagés avec la population lorsqu’ils seront disponibles.

Ces réponses sont particulièrement attendues dans le cas des spécialistes, dont on se demande si l’objectif de rattrapage n’a pas été dépassé.

Il sera important de le savoir. D’autant que la FMSQ a obtenu que les éventuels écarts soient corrigés dans un sens seulement : à l’avantage de ses membres.

Le rapport de l’ICIS ne pourra pas remettre en question les engagements financiers et les sommes prévues jusqu’en 2027, indique en effet l’entente. Par contre, s’il trouve un écart à corriger, les versements devront commencer en avril 2020 au plus tard…

Un autre aspect mérite réflexion : la part du budget accaparée par la rémunération médicale.

Le Ministère réussira-t-il à faire tenir son plafond de 20 % ? Ce sera à suivre. Des mesures correctives en cas de dépassement de l’enveloppe sont effectivement prévues à l’entente, mais la longue liste d’éléments qui ne peuvent pas être considérés comme des motifs de dépassement restreint considérablement ce pouvoir d’intervention.

Et même si ce plafond est respecté, il y a lieu de s’interroger sur sa hauteur. En 2006-2007, la rémunération médicale représentait 14,9 % des dépenses de programme du Ministère. En 2013-2014, elle avait grimpé à 18,8 %. Aller jusqu’à 20 % rendra-t-il notre système de santé plus performant ? Il faut se poser la question, car la part réservée aux médecins réduit d’autant les ressources pour les autres dépenses – incluant celles liées au personnel hospitalier, dont beaucoup de médecins ont besoin pour traiter leurs patients.

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