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Réparer le système de santé est une urgence nationale

D’ici 2025, le ministre Christian Dubé promet d’améliorer sensiblement le réseau de la santé. Personne ne doute de sa bonne foi. Le vrai problème est ailleurs.

JOSÉE LEGAULT, JOURNAL DE QUÉBEC

Il se terre dans l’état avancé de dysfonction du système public québécois de santé et de services sociaux. Pour ceux qui en doutaient encore, la pandémie l’a brutalement confirmé.

Les urgences qui, depuis des décennies, débordent 24/7 comme des lavabos bouchés, en sont l’ultime canari dans la mine. Pour de nombreux Québécois, sans accès normal à un médecin de famille, qu’ils en aient d’ailleurs un ou pas, l’urgence est le dernier recours.

C’est le terminus débordé d’un réseau public détraqué. Ce qui, dans une société riche et vieillissante comme la nôtre, est injustifiable.

Pendant ce temps, les fournisseurs de soins privés s’enrichissent de plus en plus en capitalisant sur un accès souvent impossible au réseau public. Un système à deux vitesses, vous dites ? Sans blague.

Or, dans ce réseau qui craque, il y a des humains. Des soignants. Épuisés à la corde. Puis, il y a nous. Des patients impuissants, pourtant censés être la grande priorité du système.

C’est pourtant aux patients qu’on demande de « sauver » ce système en y allant le moins possible alors que c’est au système de prendre soin d’eux. Cherchez l’erreur.

Crise profonde

Parce que la crise en santé perdure depuis longtemps, à l’usure, un de ses nouveaux dommages collatéraux est l’érosion de l’empathie envers les patients.

Le phénomène, heureusement, n’est pas généralisé. Si le réseau ne prend pas du mieux d’ici peu, il risque toutefois de le devenir un jour.

Prenons, parmi d’autres, le cas révoltant de deux personnes qui, en grandes douleurs, ont été laissées sans soins à l’urgence durant des jours, au point où elles ont dû passer des heures couchées sur le plancher sans que personne ne s’en occupe. 

À ce compte-là, c’est de la médecine de brousse. Même un chien couché sur le plancher aurait eu plus d’attention. La pénurie de main-d’œuvre fait mal, mais elle n’explique quand même pas tout.

Le réel ne ment pas

Derrière les colonnes proprement alignées de statistiques et de données au ministère de la Santé, le réel, lui, ne ment pas. Plus longtemps on laisse le réseau public se déglinguer, plus on épuise et dévalorise le personnel soignant.

Plus on l’épuise, plus le risque est qu’il finisse par se vider de son réservoir pourtant essentiel d’empathie envers les personnes dont il doit prendre soin.

Cette fatigue extrême et répétée – sans compter l’effet toxique sur la qualité des soins du temps supplémentaire obligatoire –, trois ans de pandémie l’auront même décuplée.

Quand la « fatigue de compassion » frappe des soignants au bout du rouleau, par réflexe d’autopréservation, la tentation peut être de se détacher émotivement des patients. Lesquels s’en trouvent déshumanisés.

On observe la même chose dans les services sociaux. Particulièrement auprès des personnes les plus vulnérables. 

Si le réseau public perd une part de son humanité, ce n’est pas parce que les soignants n’ont pas de cœur. Au contraire. C’est parce qu’on les oblige à travailler dans des conditions trop souvent indignes d’une société se voulant avancée et humaniste.

D’où l’urgence nationale de réparer pour vrai le réseau public de santé et de services sociaux. Non pas pour sauver la « machine », mais pour sauver les humains que nous sommes, usagers et soignants. 

SOURCE: JOURNAL DE QUÉBEC

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