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Le projet de loi fédéral pour protéger les régimes de retraite adopté à l’unanimité

Le projet de loi C-228 qui vise à protéger les régimes de retraite des travailleurs en cas de faillite d’une entreprise a été adopté à l’unanimité mercredi lors du vote sur la troisième lecture à la Chambre des communes, grâce à une alliance entre les partis d’opposition, à laquelle s’est ajouté in extremis l’appui des libéraux.

Selon les résultats annoncés en Chambre, 318 députés se sont prononcés en faveur et aucun n’était contre.

« C’est une grande journée! C’est quelque chose qu’on attend depuis 20 ans. »— Une citation de  Marilène Gill, députée bloquiste

Cette grande journée est pour elle l’aboutissement d’un travail qui a débuté il y a sept ans.

À pas moins de trois reprises – en 2015, en 2019 et en 2021 – elle a présenté un projet de loi visant à défendre les fonds de pension.

Puisque la loto des projets de loi émanant des députés ne lui a souri que les deux premières fois, lors de la présente législature, Mme Gill a travaillé de concert avec d’autres députés, dont la conservatrice Marilyn Gladu – qui, elle, a été chanceuse au moment du tirage au sort – afin de faire progresser ses idées par l’entremise de cet autre projet de loi semblable, un choix qu’a également fait Daniel Blaikie, du Nouveau Parti démocratique (NPD).

En entrevue avec La Presse canadienne, Mme Gladu a expliqué la recette qui a permis l’adoption de son projet de loi avec ou sans l’appui des libéraux : aller à l’essentiel. Je voulais avoir seulement des éléments avec lesquels tous les partis étaient déjà d’accord, a résumé la marraine du projet de loi.

À titre d’exemple, le document législatif ne propose rien en matière de protection des assurances collectives, au grand dam du NPD, qui voulait qu’elles soient maintenues, et du Bloc québécois, qui proposait une indemnité. Les conservateurs s’y opposaient, notamment parce qu’il est difficile d’en calculer la valeur, a dit Mme Gladu.

L’exercice se compare à une négociation où chacun a dû faire des compromis, a illustré Mme Gill. Le mieux est l’ennemi du bien. On préfère avoir un gain que rien du tout. […] Voir un projet de loi qui a la chance d’être adopté, c’est énorme.

Le néo-démocrate Daniel Blaikie a toutefois reproché aux libéraux d’avoir bloqué son amendement visant à protéger les indemnités de départ ou de préavis, même si ces dispositions auraient vraisemblablement recueilli une majorité parlementaire.

Lors de l’étude du projet de loi, le président du Comité permanent des finances a déclaré irrecevable cet amendement, estimant qu’il dépasse la portée et le principe du projet de loi. Le NPD a contesté la décision, jugeant qu’il s’agit d’une interprétation trop étroite, et a forcé un vote qui a annulé la décision et adopté les dispositions.

Loin de s’avouer vaincus, les libéraux en ont appelé la semaine dernière au président de la Chambre des communes. Anthony Rota a invalidé la décision du comité et annulé l’amendement.

Sabotage

M. Blaikie a également accusé les libéraux d’avoir fait des tentatives pour saboter le projet de loi, en référence à une série d’amendements qui ont été défaits en comité. Ils ont notamment essayé, en vain, de convaincre leurs collègues de conférer aux retraités un rang de créancier inférieur à celui proposé dans le projet de loi.

Andy Fillmore, le secrétaire parlementaire du ministre de l’Innovation, des Sciences et de l’Industrie, avait entre autres déclaré que le projet de loi place les employeurs dans une situation de risque intolérable de faillite et donc de pertes d’emploi et que la meilleure façon de prendre soin des retraités réside dans un paiement préférentiel et non une superpriorité.

Pour finir, les membres libéraux du comité ont malgré tout voté comme leurs collègues des oppositions pour adopter le projet de loi tel que modifié.

La façon dont les libéraux allaient se prononcer lors du vote ultime à la Chambre des communes de mercredi n’a été révélée que quelques minutes avant qu’il se tienne, lorsque le premier ministre Justin Trudeau a répondu à une question du chef du NPD, Jagmeet Singh.

Nous appuierons le projet de loi C-228, mais nous ne prendrons aucune leçon d’un Parti conservateur qui a fait la guerre aux travailleurs pendant une décennie et qui n’a rien à offrir aux Canadiens, à l’exception de bitcoins et de mots à la mode, a-t-il déclaré.

Le vote de mercredi a été précipité à la suite d’un tour de passe-passe, gracieuseté des bloquistes. Ils ont proposé que les conservateurs prennent un de leurs tours de parole afin que puisse se tenir plus rapidement la dernière heure de débats de C-228 et que le projet de loi soit adopté avant les Fêtes.

Une très bonne nouvelle, dit la FADOQ

L’adoption de ce projet de loi constitue une très bonne nouvelle pour les retraités, estime la FADOQ, une organisation aussi connue sous le nom de Fédération de l’âge d’or du Québec.

« Depuis 2005, il y a eu trois projets de loi privés, deux projets de loi du gouvernement à ce sujet-là, puis aucun d’entre eux n’a été adopté. »— Une citation de  Philippe Poirier-Monette, porte-parole de la FADOQ

Les retraités sont en ce moment, grosso modoles derniers à piger dans le bol pour avoir des versements qui combleraient les déficits de leur fonds de pension, a dit Philippe Poirier-Monette, porte-parole de la FADOQ . Une fois le projet de loi adopté, ils ne verront plus à peu près tout le monde passer avant eux, puisqu’ils feront partie des créanciers prioritaires.

M. Poirier-Monette a soutenu que les retraités de Sears, de Nortel Networks, de la minière Cliffs sur la Côte-Nord et de l’usine MABE, qui était détenue par General Electric, auraient par exemple été mieux protégés si ce projet de loi avait été en vigueur lors de ces grandes faillites.

Désormais, les tribunaux ne pourraient plus accepter des ententes de restructuration si cela n’inclut pas des versements de sommes aux fonds de pension qui sont déficitaires, ce qui a récemment forcé les retraités des journaux de Groupe Capitales Médias à subir initialement une perte de 30 % de leur rente, a-t-il noté.

Le projet de loi est bel et bien un compromis. La FADOQ croit d’ailleurs que les fonds de pension devraient être une créance garantie, comme tout ce qui a été promis aux retraités.

M. Poirier-Monette semblait toutefois marcher sur des œufs en commentant le déroulement des travaux. On se serait attendu à ce que les libéraux soient plus enclins à adopter rapidement le projet de loi, pas à essayer de mettre des exceptions, de mettre en quelque sorte des bâtons dans les roues des travailleurs et des retraités, a-t-il lâché, notant au passage que ceux-ci ont donné une voix au secteur financier.

Maintenant que la motion portant troisième lecture a été adoptée, le projet de loi est envoyé au Sénat. La Chambre haute peut également y proposer des amendements. S’il est adopté sans amendements, il reçoit alors la sanction royale et devient une loi, mais autrement les deux chambres du Parlement devront s’entendre sur une même version du document législatif.

Grâce à l’appui unanime au projet de loi, l’épée de Damoclès d’amendements qui viendraient du Sénat est moins menaçante puisque les libéraux l’ont appuyé et que la majorité des sénateurs ont été nommés par cette formation politique.

Source: Radio-Canada

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